J’aimerais bien qu’il chante. Un jour ! Car pour le moment j’ai l’impression d’avoir le cœur sec, aussi sec qu’un pruneau moisi de trois mois. Appétissant.
Avilissant. Je mange pour oublier, je me fuis, je me trouve répugnante, dégueulasse, malsaine, je suis malade. Je ne voudrais même pas de moi.
Tout mon être pleure, il pleure mon malheur, il pleure mon père, il pleure ma mère et mes sœurs, il pleure mon existence. Si vivre signifie souffrir même dans le bonheur, alors vraiment, non, ce n’est pas la peine de donner naissance.
Seul on ne résiste pas, on ne résiste plus, on abandonne et on ne souhaite que crever.
Je ne rêve pas, et parfois je me demande si je n’ai jamais rêvé un jour… J’ai l’impression que je fais exprès de construire des relations pour me voir les détruire, les laisser pourrir, pour me voir décevoir. C’est comme si je devais être parfaite, j’ai peur de l’échec, peur de ne pas être assez bien, peur d’être inutile et qu’on puisse me jeter, comme on jette un mouchoir, vous voyez.
Papa tu me manques. J’aimerais que tu sois là pour me prendre dans tes bras, que je puisse pleurer tout mes petits malheurs et que tu sois là pour me rassurer. Maman n’arrive déjà pas à se gérer, comment veux-tu qu’elle arrive à me sécuriser intérieurement ? Rien ne me prouve que je puisse lui faire confiance. Je suis désolée Papa, on aurait dû te faire confiance, même si tu n’avais pas toujours raison, je sais désormais que Maman a profité de la situation pour t’enfoncer, pour se sentir forte, pour renforcer son pouvoir envers nous. Comme il est bon de se sentir soutenu. Désolée de t’avoir privé de ce sentiment. Dans 23 jours, tu aurais eu 46 ans, mais putain 46 ans ce n’était pas difficile, bon sang, pourquoi ne m’as-tu pas parlé ? Tes yeux étaient si tristes, tu avais perdu l’envie de vivre, je voulais te sauver et jamais je ne me pardonnerais d’avoir échoué. Oui, finalement je l’avoue, je crains de me sentir responsable de ta mort Papa, je t’ai tué, ou plutôt je n’ai rien fait pour te sauver, je t’ai laissé couler, je t’ai regardé sombrer lentement, sans rien dire, ni faire, sans un mot, en l’ignorant presque.
Il y a dans la chambre d’à côté un petit bébé qui aurait fait ta joie, qui t’aurais rendu gaga, qui t’aurais redonné de l’espoir. Et lui aussi méritait de te connaître, il méritait d’avoir un grand père aussi génial que toi.
Je sais que je dois aimer mon prochain, mais je la hais, je la hais de t’avoir laissé tomber, de t’avoir tourné le dos. Pour moi, elle est aussi responsable de ta déchéance, car quand on aime, on tend la main vers son amour pour l’aider à se relever. Ô comme je lui en veux. Mon cœur suppure de haine, de cris étouffés, d’amour passion mais surtout ma vie restera inachevée. Je suis d’une fatalité ! Je me fais rire, je n’y crois qu’à moitié ?
Je ne sais pas comment m’en sortir, je suis un peu perdue je crois…